Architecture et habitat traditionnels kabyle. Taddart

Ruelle et terrasse dans le village de Zemmoura
Ruelle et terrasse dans le village de Zemmoura

Taddart, le village kabyle, est généralement placé sur une crête (tawrirt) ou un plateau élevé (agwni), emplacement dont souvent son nom rend compte (exemple : Tawrirt Mimoun, tawrirt Aden). Il est composé d’un ensemble de ruelles et de maisons, d’une fontaine, d’une mosquée et du lieu d’assemblée, tajmaat.

 Taddart (le village)

Les maisons sont étroitement regroupées de façon à ce que leur ensemble, vu de l’extérieur, forme un bloc unique. En élévation, elles paraissent se chevaucher, chaque pignon dépassant le pignon voisin en montant vers le sommet. Pressées les unes à la suite des autres au long des lignes du relief, elles forment de véritables agglomérations descendant rarement en dessous de cinq cents habitants. Cette répartition dense est sensiblement identique à celle des casbahs.

Ce type de village répondait notamment, avant l’apparition de l’artillerie, à des préoccupations défensives201. À partir du xxe siècle et surtout de la guerre d’Algérie, le déclin de l’agriculture et l’exode rural le mettent progressivement en concurrence avec les villes qui offrent toutes les commodités202. Simultanément son architecture se trouve sérieusement menacée par l’introduction du béton.

Axxam (la maison)

Maison de kabylie

Maison de kabylie

La maison kabyle, dite axxam, est une construction traditionnelle de montagne, plus ou moins décorée et ornée selon l’importance sociale et la richesse du propriétaire, de sa famille ou de sa tribu. Il y a deux grands types de maison, à tuile et à terrasse, certaines constructions mêlant les deux structures. Les fondations sont des tranchées comblées avec de grosses pierres (adrar) et du mortier d’argile. Pour les murs, deux techniques sont principalement employées, le mur de pisé avec un coffrage en bois (tabbadit) et le mur de pierre (taghaladt). La charpente est faite de poutres (isulas), la poutre centrale (asulas alemmas) étant souvent la plus importante. Les poutres reposent sur les murs et parfois sur des piliers de bois (tikjda). La toiture est faite de roseaux (ighunam) ou de branches d’olivier (tachita n tazemmurt) et de tuiles d’argile (karmoud). Souvent, plusieurs maisons sont regroupées autour d’une cour centrale appelée oufrag.

Les fonctions économiques de la maison sont réparties en trois espaces distincts : addaynin pour le bétail, takanna pour les provisions et takaat, dans lequel est disposé le métier à tisser. Le travail intérieur concernant le sol et les murs revient aux femmes. Les murs sont crépis à l’aide d’un enduit composé d’argile schisteuse passée au tamis, à laquelle on ajoute de la bouse de vache et de la paille fine pour éviter les fissures. Les fresques murales ont recours à des symboles variés, aux significations multiples. La décoration extérieure concerne les portes, sur les battants desquels le menuisier incise au moyen d’une pointe de fer des motifs faits de lignes droites, de points, de petits cercles, de rosaces et de croix qui forment des compositions d’ensemble.

 Ouvrages civils et religieux

La région possède un patrimoine civil encore vivant. C’est le cas par exemple des salines traditionnelles (tamellaht), comme celles que l’on peut rencontrer dans les Bibans : elles sont constituées de bassins d’argile de couleur ocre dans lesquels l’eau, issue d’une source naturellement salée, s’évapore lentement.

Le patrimoine religieux de Kabylie est riche d’une multitude de mausolées (taqubet, littéralement « le tombeau »). D’architecture généralement assez simple, ce sont des lieux de mystique et de mémoire. Parmi les plus célèbres figurent ceux de Yemma Gouraya et de Mohand Ou Lhocine. Certains recoivent toujours un grand nombre de visites. Un des plus connus et des plus ornés est celui de Cheikh Amokrane, à Aït Zelal, auquel Cheikh El Hasnaoui a consacré une chanson[193]. Cheikh Aheddad, un des chefs de la révolte des Mokrani, possède aussi le sien dans son village de Seddouk Oufella.

Une caractéristique de la région est la densité du réseau de ses zaouïas, qui ont historiquement joué le rôle de « Mecque des Kabyles » : en plus d’un savoir religieux, elles enseignaient les règles sociales du pays. Leurs élèves venaient de toute l’Algérie, y compris des grandes villes et du Sahara. Cependant elles ont connu au cours du XXe siècle un net déclin de leur influence. Parmi les plus connues figurent celles de Sidi Saïd à Akbou, de Sidi Mansour El Djennadi, fondée en 1635 à Fréha, de Sidi Mhand Oumalek, de Tassaft, etc. Pour la seule wilaya de Tizi Ouzou on compte encore 21 zaouïas en activité, où étudient 500 talebs. Elles possèdent toujours un important patrimoine mobilier, architectural et agricole.

Les mosquées de Kabylie connaissent une grande variété de styles. Entourée de vestiges puniques et romains, la jamaa El Kevir du vieil Azeffoun a pour minaret une antique tour de garde construite sous l’empereur Auguste ; deux colonnes romaines supportent le toit de sa salle de prière]. Ses pierres massives contrastent avec les mosaïques mauresques de la jamaa Sidi Soufi de Béjaïa. Dans cette même ville, les murs de la mosquée de la casbah, en attente d’un programme de restauration, conservent la mémoire des cours qu’y a donnés Ibn KhaldoBéjaïa possède aussi une ancienne synagogue, trace d’une présence juive citadine, au dôme multicolore.

Ouvrages militaires

Porte Fouka à Bejaia

Porte Fouka à Bejaia

La forme de structure défensive la plus ancienne et la plus répandue est l’organisation des villages kabyles et leur situation sur des points stratégiques, tirant parti du relief de la région. Cependant au cours de l’histoire, les dynasties musulmanes locales, soucieuses de protéger le siège de leur pouvoir, ont doté leurs capitales respectives de citadelles et de murailles : en témoignent celles élevées successivement par les Hammadides à la Kalâa des Béni Hammad et à Béjaïa.

La casbah de Béjaïa, bâtie en 1067 et située au cœur de la cité historique, s’étend sur 160 mètres du nord au sud et occupe une surface de 20 000 m2, enceinte d’un mur de 13 mètres de hauteur. La ville conserve également une partie de ses murailles d’époque hammadide, notamment Bab el Bahr, la « porte de la Mer », qui servait d’arc de triomphe. Les Espagnols, qui l’ont occupée entre 1510 et 1555, y ont laissé des édifices comme le Borj Moussa, construit en pleine ville à partir d’un palais hammadide, devenu musée d’antiquités tout en ayant gardé son aspect massif et ses meurtrières ; ou le Borj Yemma Gouraya, bâti à 670 mètres d’altitude autour d’un ancien poste d’observation, qui surplombe Béjaïa et son golfe. L’architecture actuelle du fort est due aux militaires français qui à leur arrivée dans la région en ont remanié les structures en fonction de leurs besoins, comme ils l’ont fait pour d’autres ouvrages militaires. Ayant d’abord été le lieu du tombeau de la sainte patronne de la ville, Yemma Gouraya, il reste un but de pèlerinage pour les populations locales qui font l’ascension de la montagne pour visiter les lieux.

La Kalâa des Aït Abbas, bâtie en 1510 au cœur de la chaine des Bibans, est l’ancienne capitale fortifiée du royaume des Aït Abbas. Elle reprend l’architecture des villages kabyles, très agrandie et complétée de fortifications, de postes d’artillerie et de guet, de casernes, d’armureries et d’écuries pour les unités de cavalerie. Une grande partie de ces structures, bombardée durant la guerre d’Algérie, est aujourd’hui dans un état délabré. Mais le site garde des joyaux comme sa mosquée d’architecture berbèro-andalouse.

La Grande-Kabylie également est parsemée de nombreux forts, comme le Borj Boghni et le Borj Tizi Ouzou, qui ont été édifiés à partir du XVIe siècle par la régence d’Alger pour encercler et contrôler la région et faire rentrer l’impôt. D’architecture simple, ils ont souvent été enlevés par les tribus locales soucieuses de garder leur autonomie. rdj Bou Arreridj, le Borj Mokrani, bâti sous Hassan Pacha, a été pris par les Mokranis à plusieurs reprises au cours du XVIIIe siècle, ce qui lui vaut son nom actuel.

Suivre et participer sur wikipedia

Vous aimerez aussi...

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *